FBI N°12 Zidanement parlant 22012016
n°12
« Jouer contre Zidane c’est un
peu comme jouer au bonto : tu
vois la balle puis tu ne la vois
plus » : Gennaro Gattuso
L
a « fin des territoires »1 ; « la nuit tous les chats sont gris »
et voilà qui est dit. La mondialisation, la lutte contre les
frontières superficielles est lancée. L’émotion, tout doucement,
le refus de l’autre redevient un crime contre l’humanité. L’empa‐
thie, sport… que le football a de tout temps exprimé tout juste
armée de bonne volonté, a repris le dessus.
La grande âme, on ne jure plus que par l’idée si productive d’une
telle économie. « Que le meilleur gagne » et voilà qui est dit.
N’est meilleur que celui qui gagne, qui capitalise le bonheur de
son prochain. Après tout, c’est ça la vie ; un Homme sur une bal‐
le, qui cherche à gagner les filets de l’éternité. Ce « chiffre » qui
n’inspire que de l’admiration de part et d’autre de la rivière. Cet‐
te « chair » qui dans ses orages mêmement, conserve l’unanimi‐
té religieuse de sa hauteur. On ne voit que l’Homme, le grigri et
la raison de son émoi… et lui alors? C’est bien là, la réponse!
FBI n°12
Y
Zidanement parlant
es we Cannes… le choix est fait. Les parents de
Yazid ont opté pour la croisette. L’AS Cannes sera de
ce fait la véritable étape bleue d’une carrière qui débu‐
te bien avec un festival. Un festival international ; de
gestes déroutants, parce qu’aux talons d’un tel talent,
c’est presque normal de rejoindre l’élite européenne
seulement 2 ans après environ (1990‐1991), grâce à
une belle 4e place. Trop lent pour certains mais la pal‐
me d’or est là et Bordeaux en profitera ensuite. Un ex‐
ploit ; l’explosion, face à Milan, une finale de coupe de
l’UEFA perdue face au Bayern et le sommet du
« triangle bordelais » est invité à faire valoir ses pro‐
messes plus haut...
« Mais ce qui me
fascinait le plus
chez lui, c'était
son toucher, très
souple très aé‐
rien. Voilà ce qui
le rendait si diffé‐
rent des autres :
il avait une gran‐
de élasticité. » :
Fabregas
En route pour l’Italie. La Vieille Dame est séduite et le
prodige signe en 1996. Il y gagnera dès ses 2 années
liminaires, le scudetto ; performances qui lui vaudront
un mondial bleu. La consécration pour faire court. Zi‐
dane président fait mieux que Platini ; un doublé face
au Brésil et 1, et 2 et 3‐0 : la France à domicile, est
championne du monde pour la 1e fois de son histoire.
Couronne qu’il confirmera en 2000 en remportant l’Eu‐
ro, une joie internationale qui contraste avec les 2 fina‐
les successives de LDC perdues par les turinois (98 et
99). Non! Il n’est pas poisseux et la volée de Glasgow le
prouvera. Parti en 2001 de la Juve, le français rempor‐
tera enfin, en 2002, cette fameuse LDC sous le maillot
de la Casa Blanca...
Zidane est un galactique, Zidane est immense. Une icô‐
ne ; la génération 98 ne jure que par lui. Et quand en
2002 à Corée‐Japon, il est absent, la France « disparaît
de la compétition ». Il est « le dernier grand joueur de
football »2 et ça peut être pire. Aimé Jacquet disait
qu’ il faut le protéger ; l’éloigner de Yaz le judoka, inuti‐
le sur le tatami vert. Et le coup de boule en finale du
mondial 2006 lui donnera raison. Encore de l’or perdu
(après le Ballon d’or 2000). Zizou était le meilleur, su‐
périeur à toute la Squadra Azzura et Materazzi le sa‐
vait... il savait que ZZ avait un talon d’Achille : son sang
chaud…
Un tir, un but
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ussi, c’est terminé. Tout est bien qui finit mal. Zizou sème la zizanie en pleine « Zidanie ».
Le meilleur joueur français de tous les temps part sur un coup de tête, et l’hexagone... même
s’il ne le dit pas explicitement, lui en veut . Comme il en veut à David Trézeguet, le libérateur
du championnat d’Europe Belgo‐néerlandais, d’avoir manqué ce tir au but, il en veut au père
d’Enzo d’avoir perdu son sang froid face à l’intériste ; geste qu’il ne regrette point… d’ail‐
leurs. Ils le voulaient vraiment ce deuxième sacre mondial ; mais tant pis pour eux. Un messa‐
ge clair est ainsi lancé en direction du lambda qui a tendance à oublier qu’en France, il y’a eu
98 en 2000 et qu’il y’aura toujours un avant et un après Zi‐C.
« Materazzi, c'est l'homme du match, ce n'est pas Pirlo. Le faire finir (Zidane) de cette manière,
c'est triste. Il a fait une grande carrière, une grande Coupe du monde. Quand on prend comme lui
pendant 1h20 et que l'arbitre laisse gentiment faire, on comprend. On n'excuse pas, mais on com‐
prend. » : Raymond Domenech
À sa sortie du vaisseau berlinois, Zidane, parti pour de vrai cette fois‐ci, ne s’est pas éloigné
des terrains à vie. Il veille alors sur sa passion de l’extérieur. L’exil espagnol, conséquence di‐
recte ou non de la sortie prématurée du 9 juillet 2006 ? Non? Oui ? Zidane au Réal Madrid est
chez lui. Le président l’adore, les socios l’adorent et les joueurs le respectent. Ses différents
coups de sang semblent circuler dans toutes les têtes de ses hommes en toute quiétude. Il
« ne gaspille pas ses mots »3 : le divorce est clairement consommable.
Toutefois la vie d’un entraîneur n’a rien à voir avec celle d’un meneur de jeu. Les victoires sont
l’oxygène de sa pérennité sur le banc. Légende ou pas ; il faut gagner, 3 points c’est tout. On
pense à Maradona ; on ne pense pas à Cruyff et à Guardiola parce que l’As de Cannes est plus
grand ; on pense à tous ces très grands footballeurs qui jouaient avec facilité et qui ont du mal
à comprendre la difficulté de l’ordinaire…
Un tir, un but
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Références
1 Bertrand Badie
2 Pelé
3 L. Modric